Après la tempête de la veille, ce jeudi d'octobre était gris et maussade. C'était le jour des obsèques de Jean-Pierre Casamayou.
Soudain, à la sortie de l'office religieux, à la grande surprise, un magnifique soleil automnal fit son apparition et illumina le parvis de l'église. Certains y verront un signe du ciel...
Le cercueil sur lequel avait été déposé le béret béarnais de Jean-Pierre fut immobilisé le temps du dernier adieu avec la diffusion d'un enregistrement de la chanson béarnaise de Jan de Nadau, "Los de qui cau" (Des gens dont on a besoin). Le camion mortuaire prit ensuite le chemin du cimetière.
De mémoire de vieux Navarrais on n'a jamais vu autant de monde à des obsèques dans l'église Saint Germain. Elle était pleine à craquer. Avant le début de la cérémonie toutes les places assises ont été prises. Les gens se serraient debout, nombreux durent rester à l'extérieur. Une montagne de gerbes entourait le cercueil. Les employés de la maison Casamayou, en blouses blanches, avaient formé une haie d'honneur devant le porche d'entrée.
Cette affluence record témoigne de l'estime, de l'amitié et de la reconnaissance dont bénéficiait Jean-Pierre qui nous a quittés à l'âge de 70 ans.
Avant que débute l'office religieux, ses deux fils, Jean-Louis et Jean-Baptiste exprimèrent leur admiration pour leur père, tout comme ils l'avaient déjà fait deux jours avant, sur facebook avec une vidéo à l'appui : "Tu étais notre pilier, notre modèle, nous sommes très fiers. Tu as su donner la vie mais aussi l'envie. Tu as juste oublié de nous donner la recette de ton humour dont nous aurions bien besoin aujourd'hui..."
"Il portait fièrement le béret béarnais"
L'ancien maire de Navarrenx Jean Baucou mit l'accent sur l'animateur hors pair qui agissait toujours dans l'intérêt général et rappela que Jean-Pierre était imprégné de culture béarnaise, portait fièrement le béret, et parlait couramment la lengua de nouste (la langue de chez nous).
Trois autres personnes, Michou, l'ami d'adolescence, enfant de Navarrenx ; Gérard Biancalana, ancien président de l'AAPPMA du gave d'Oloron, collègue de pêche du saumon ; Didier, d'Andernos, complice et ami de 43 ans de foires de Bordeaux et de Pau, se succédèrent au micro pour dire leur bonheur d'avoir côtoyé "Jean-Pierre à la pêche", "Jean-Pierre à la foire", "Jean-Pierre à la saumonade", "Jean-Pierre chez lui à Navarrenx"... Ils évoquèrent ces années de solides amitiés, de solidarité, de générosité, les éclats de rires... Et tous de rappeler ce culte de l'humour que savait cultiver Jean-Pierre, toujours avec le souci de respecter les autres, de ne jamais blesser personne.
Dans son homélie, l'abbé Sanche de Franssu qui a toujours eu plaisir de croiser Jean-Pierre en ville "a été édifié par cet homme de grand coeur, sa bonté, son respect, mais aussi par la discrétion de sa foi gardée au plus profond de lui-même". Jean-Pierre s'est éteint lundi matin, doucement, apaisé. C'était le jour de la fête de Notre Dame du Rosaire. Des chants et prières à la Vierge animèrent la cérémonie des obsèques avec, en final, un retentissant "Boune May dou boun diu" (Bonne mère du bon dieu) repris en choeur par l'innombrable assistance, mêlant notamment de belles voix béarnaises et basques. Les voûtes de l'édifice Saint Germain en ont tremblé.
Reste maintenant le souvenir, l'exemple à suivre
Jean-Pierre Casamayou avait fait de son nom une marque. La garantie de la qualité. "C'était un passionné, toujours à la recherche de la perfection" nous disait le réputé industriel salaisonnier Michel Dupuy (leader du Jambon de Bayonne) présent aux obsèques.
Les secrets de chez Casamayou : le tout fait maison ; les recettes de charcuterie dans la tradition du pèle porc béarnais ; aussi et surtout l'excellence de la matière première, les Blondes d'Aquitaine, les porcs Manex, sélectionnées dans les meilleurs élevages du coin (proximité et lien de confiance avec les éleveurs).
Puis, il y a le relationnel. Jean-Pierre disait : "Quand on ouvre son magasin on se met en scène, on ne vend pas que de la charcuterie, on parle du pays, de la culture béarnaise, du gave d'Oloron, du saumon..."
Côté animation de sa chère ville Navarrenx, Casa a été en première ligne, jamais à court d'idées, toujours inventif et créatif. Très jeune il s'est investi dans l'Union Commerciale, a été le fer de lance de la Quinzaine commerciale avec la caravane publicitaire qui sillonnait le canton.
La saumonade à laquelle se greffa la Confrérie du Saumon, c'est lui qui en eu l'idée et l'a mise en route. Il relança également le championnat du monde de pêche du saumon. A la belle époque du Roi des Gaves, TF1 ou Antenne 2, venaient tous les ans faire un magazine sur l'ouverture du saumon. Pour être sûr d'avoir la bonne anecdote, le bon mot qui fait mouche, la meilleure prise de vue, ils faisaient appel à Jean-Pierre, excellent acteur de son territoire, bon pêcheur et remarquable ambassadeur du Béarn.
Le repas de rue organisé pour l'ouverture des fêtes de Navarrenx on le doit à Jean-Pierre. Désormais, sous l'impulsion de sa soeur Nicole c'est tous les métiers de bouche de la ville qui y participent. Les tables sont dressées dans les rues. C'est la grande fête.
Jean-Pierre Casamayou, "l'homme à la moustache", peut être fier de son bilan sur cette terre. Il est parti avec le bonheur d'avoir su communiquer l'amour de son métier à ses deux fils, Jean-Louis et Jean-Baptiste, qui ont repris le flambeau avec talent et réussite. Pour les animations et la promotion de sa ville et de son Béarn, il a montré la voie.
J.S.